Dans le cadre de la campagne présidentielle, l’Institut de la protection sociale (IPS) présente 16 propositions de réformes aux candidats.
Laurent Ouazana, président de Ciprés Assurances et membre du conseil d’orientation scientifique de l’IPS, explique la proposition de l’Institut sur la santé. L’IPS préconise d’imposer une visite médicale à tous les Français en vue d’établir un bilan de santé global de la population.
L’objectif est de mieux cibler, pour les rendre efficaces, les actions de prévention. Pour l’IPS, le médecin traitant doit être au cœur de ce dispositif dont le but consiste aussi, compte tenu de la prise en charge des dépenses de santé par la collectivité, à responsabiliser les patients
Previssima. – Bon nombre de candidats à l’élection présidentielle font de la prévention un pilier de leur programme en santé. D’où vient cette prise de conscience ?
Laurent Ouazana. – Elle provient en grande partie des déficits cumulés de l’Assurance maladie, de l’ordre de 115 milliards d’euros ces 15 dernières années. La part de la Sécurité Sociale dans le financement de la consommation des soins et biens médicaux ne cesse d’augmenter. En 2015, celle-ci frôlait les 77 %, le reste étant pris en charge principalement par les organismes complémentaires et les ménages.
Ces chiffres doivent être comparés à ceux de la moyenne de l’OCDE qui se situe autour de 72,5 %. Même si les causes de ce déséquilibre sont connues – vieillissement de la population, hausse du coût des traitements…, chercher à réduire les dépenses de santé tout en maintenant un système de soins de haut niveau est un impératif.
Mieux agir sur la prévention peut nous y aider, tout simplement parce que plus la prise en charge d’une pathologie intervient tôt, c’est-à-dire dès les premiers symptômes, plus grandes sont les chances de guérison, et plus les économies seront importantes pour la collectivité.
Pour cela, il ne faut pas se contenter de campagnes d’informations. Chaque année, les pouvoirs publics consacrent environ 3 milliards d’euros pour mettre en place des plans de prévention basés sur la sensibilisation et la responsabilisation des citoyens. Mais à l’instar de la vitesse sur la route, force est de constater que l’éducation des esprits a ses limites.
Si les résultats de ces campagnes d’information sont faibles, c’est principalement à cause d’une absence de ciblage. Aucune mesure d’efficacité de ces campagnes n’est effectuée, contrairement à ce qui se passe en Grande Bretagne par exemple. Or, la prévention est utile quand elle est ciblée sur les populations à risques. Le problème est qu’en France, nous avons une vision très limitée de celles-ci, faute de maîtriser les données de santé. Résultat, le système de santé se dégrade par manque de connaissance de l’état de santé de la population.
Que proposez-vous pour répondre à cet objectif ?
– Nous pensons que la solidarité doit avoir une contrepartie qui dépasse la notion de cotisation assise sur le revenu. Chaque citoyen qui bénéficie des prestations de la Sécurité Sociale doit être responsable de son capital humain et de son « entretien ».
L’IPS estime qu’il est temps de mettre en place un « radar » de bonne santé de la population, en imposant une visite médicale unique chez le médecin traitant pour tous les Français de plus de 10 ans.
Cette visite aura pour but de recenser les données de santé. Elle insérera dans le cadre d’une campagne nationale pensée en amont par un comité scientifique qui en validera le contenu. Un comité éthique devra rédiger une charte d’utilisation de ces données, suffisamment ouverte pour qu’elles soient exploitées et efficaces.