Largement engagé dans le mouvement du « choc de simplification », l’Institut de la Protection Sociale, alerte depuis de nombreux mois les pouvoirs publics et institutionnels sur les risques de redressements URSAFF qu’encourt un large pourcentage des entreprises françaises.
Michel Hallopeau*, en tant que membre actif du Comité Technique dédié à la simplification de la réglementation à appliquer par les entreprises, pouvez-vous nous rappeler la menace qui pèse aujourd’hui sur les entreprises françaises ?
La menace est celle d’un redressement c’est-à-dire d’un assujettissement à charges sociales du financement patronal notamment des garanties de prévoyance, dans la mesure où la réglementation prévoit que la part patronale est fixée à un taux uniforme avec une exception sur les seuls risques incapacité/invalidité et dans la mesure où la croissance salariale est au moins égale à la croissance patronale.
Le taux de charges sociales est de l’ordre de 25% du financement patronal.
L’ACOSS a très rapidement réagi à la publication officielle de l’IPS. En tant que juriste, quelle analyse faites-vous des éclaircissements apportés par l’ACOSS (voir la note de l’ACOSS) ?
L’ACOSS a fait une note aux rédactions réagissant aux affirmations de l’IPS qui d’après eux ne seraient pas fondées. Ce mémo fait référence aux régimes de prévoyance portant sur l’incapacité, l’invalidité et le décès (c’est une définition du contenu des garanties de prévoyance) et la possibilité de contributions patronales distinctes par tranches de salaire sous réserve de respecter la progression également appliquée à la cotisation salariale. Par le biais de cette note, l’ACOSS rappelle néanmoins que les règles sont posées par les décrets du 9 janvier 2012 et 8 juillet 2014 et n’interdisent pas de moduler le niveau des contributions pour le financement de la couverture des salariés et que ces modulations sont compatibles avec le cadre posé par ces dispositions… ce qui veut dire que ce mémo ne fait pas une exception aux dérogations aux dispositions des décrets.
Quelles avancées l’IPS a-t-elle permis d’obtenir en matière de simplification de la réglementation ou du moins de son application ?
Le contenu des articles publiés a effectivement fait réagir aussi bien la DSS (dont le service communication a contacté certains journalistes) et de même l’ACOSS aux rédactions indiquées plus haut.
Il semble effectivement que la communication qui a été faite sur les risques pour les entreprises pourrait conduire à accepter – comme cela a toujours été le cas avant les décrets de 2012 et 2014 – des taux différents par tranches elles-mêmes étant des multiples du plafond de la sécurité sociale.
A noter d’ailleurs que le service communication DSS mentionnait dans son dernier alinéa que les taux aux montants croissants en fonction de la rémunération visent l’incapacité, l’invalidité et l’inaptitude et fait également référence à la circulaire ministérielle du 25 septembre 2013 permettant de considérer que des taux différents appliqués par exemple pour les cadres sur la tranche A et sur la tranche B permettaient de considérer qu’il y avait 2 catégories. Pas évident à mon avis car les cadres qui n’ont qu’une tranche A, c’est assez rare, et ceux qui ont une tranche B ont également une tranche A…
Quelles zones de la règlementation restent selon vous encore à clarifier en matière de niveaux de contributions des entreprises pour le financement de la couverture de leurs salariés ?
Il pourrait y avoir 2 niveaux :
- soit un aménagement du décret qui ajouterait au cas des taux croissants la couverture du risque décès (en plus de l’incapacité, invalidité et inaptitude) ;
- soit une mise à jour de la circulaire du 25 septembre 2013 (juridiquement rapportée puisqu’un décret portant sur le même sujet a été publié en 2014) contiendrait la même mention que celle qui avait été indiquée en 2009 notamment sur le fait qu’il peut y avoir des taux différents par tranches de salaire.
L’Institut de la Protection Sociale, dans le cadre de son dernier communiqué de presse a pris acte de la position de l’ACOSS et a salué les éclaircissements apportés. Ces éclaircissements pourront constituer une ligne de conduite pour les contrôleurs URSSAF et MSA. En revanche, l’IPS a demandé à minima la publication au Bulletin Officiel Santé d’une circulaire DSS pour renforcer la sécurité juridique des entreprises concernées par le risque de redressement pointé par l’IPS.
*Michel Hallopeau est Avocat associé, directeur du pôle Retraite et Prévoyance d’entreprise du cabinet FIDAL. Partenaire de l’Institut de la Protection Sociale, il participe activement aux travaux du Conseil d’Orientation Scientifique de l’IPS.