Les propositions de l’Institut Montaigne constituent un temps fort de la réflexion sur les évolutions structurantes de notre pays.
La publication en juin 2015 des premières réflexions pour que le vieillissement de la population devienne « une source d’opportunités économiques et sociales tout en renforçant le lien intergénérationnel » ne fait pas exception.
Les plus de 60 ans devant constituer près du 1 / 3 de la population française d’ici une trentaine d’années, l’Institut Montaigne appelle les pouvoirs publics à faire du « bien vieillir » un projet de société.
Pour cela, il se propose d’aborder tous les enjeux de cette évolution, à commencer par celui du marché de l’emploi.
Le vieillissement de la population, qui concerne tous les pays de l’OCDE et notamment la France, est vecteur « d’autant de déséquilibres que d’opportunités ».
Entre juin et juillet, l’Institut a publié une série de cinq notes traitant de ces différents enjeux.
Arrêtons-nous en particulier sur celle traitant de la question du taux d’activité des seniors (occupés ou au chômage), qui reste dans notre pays l’un des plus faibles au sein des pays développés.
Quelques chiffres intéressants :
- Le taux d’activité a progressé au cours des dernières années surtout chez les 55-59 ans (67,1 % en 2012 ; +12 points) sans que sa place relative n’ait connu de réel changement.
- Le taux d’emploi des seniors (ceux qui disposent d’un emploi par rapport à la population en âge de travailler) baisse de plus de 25 points entre 54 et 57 ans. L’Institut y voit la conséquence des politiques menée au cours des 30 dernières années faisant de l’inactivité des seniors une variable d’ajustement à travers des dispositifs de préretraites publiques destinés à des salariés de plus en plus jeunes.
- Si les réformes récentes ont fait progresser le taux d’activité des seniors chez les 55-59 ans, celui des 60-64 ans (22,8 %) reste bien inférieur à la moyenne de l’OCDE (41 %), tandis que le chômage des plus de 60 ans a progressé de 129 % par an entre 2011 et 2013. L’Institut Montaigne suggère de renforcer l’activité des seniors à la fois pour alléger la pression sur les systèmes d’assurance chômage – en repoussant l’âge à partir duquel les seniors bénéficient de conditions d’accès plus favorables aux allocations-chômage – et d’assurance vieillesse – en ralentissant la dégradation du ratio entre cotisants et retraités -.
L’Institut fait trois propositions pour encourager le maintien des seniors dans l’emploi
- Créer une prime « maintien d’emploi » pour ceux qui décideraient de rester en activité au-delà de l’âge de liquidation des droits et à faire baisser le coût du salaire chargé de 20 % de ces mêmes salariés. Cette prime, qui pourrait représenter « six mois de salaire pour un senior travaillant trois ans de plus », serait financée par les caisses de retraite qui reverseraient les deux tiers de l’économie (20 % pour financer la prime et 46 % pour financer la baisse de charges patronales) que représente le non-versement de la pension pour les salariés concernés (soit, au final, une économie nette pour les caisses de retraite de 1,6 milliard d’euros).
- Instaurer une cessation progressive d’activité avec baisse du temps de travail. La baisse de salaire associée à une activité réduite serait partiellement abondée par l’entreprise qui, en contrepartie d’un engagement à maintenir le salarié en emploi jusqu’à l’obtention de sa retraite à taux plein, serait « exonérée des cotisations chômage et retraite et aurait droit à un taux réduit sur d’autres postes de charge ».
- Créer un contrat volontaire senior pour les retraités volontaires. Concrètement « la rémunération du retraité serait basée sur le taux horaire et l’employeur serait exonéré de cotisations patronales chômage et retraite et bénéficierait d’un taux réduit sur d’autres postes de charge » si bien que, même avec une rémunération horaire supérieure au taux horaire en vigueur, le coût du salaire chargé diminuerait quand même pour l’entreprise.
L’Institut recommande enfin d’accompagner toutes ces mesures d’une campagne de communication en direction des entreprises pour « briser les tabous autour du vieillissement » et « donner une image attractive de la population des seniors en âge de travailler ».
Plus largement, l’enjeu de maintien en activité des séniors dépasse les seules questions de financement des régimes de protection sociale.
N’oublions jamais que les seniors qui se maintiennent en activité se sentent en moyenne plus intégrés à la société et sont en meilleure santé que ceux qui, au même âge, sont déjà partis à la retraite.
Finalement la chanson avait raison (du moins au début), « le travail c’est la santé » !
Lire en détail l’étude de l’Institut Montaigne : http://www.institutmontaigne.org/fr/publications/faire-du-bien-vieillir-un-projet-de-societe