Paris, le 13 juin 2017. Au niveau des Etats européens, les discussions battent leur plein sur le projet de révision de la directive de 1996 relative aux travailleurs détachés.
Dans le cadre de ces discussions, la France propose de renforcer la lutte contre la fraude au détachement, notamment à l’égard des entreprises “boîte aux lettres ». Pour autant, le Gouvernement Français ne demande pas la remise en cause du principe actuel selon lequel les cotisations sociales applicables sont celles du pays d’origine. Or, cette règle est la source essentielle de la concurrence déloyale qui s’exerce au détriment des travailleurs Français.
A l’heure actuelle, la France compte près de 215 000 travailleurs détachés en situation régulière et plus de 100 000 en situation irrégulière. Alors que les prestations sociales (santé, retraite, prévoyance et famille) sont financées à 80% par des prélèvements sur le travail, cette situation menace gravement notre modèle de protection sociale.
L’Institut de la Protection Sociale (IPS) estime fondamental que les travailleurs détachés exerçant en France payent les cotisations sociales comme tout travailleur Français. L’enjeu est d’éviter à terme l’effondrement financier de notre système de protection sociale. Sinon, l’Etat devra réduire drastiquement les cotisations sociales pour les transférer sur la consommation avec la TVA ou sur les retraités avec la poursuite de l’augmentation de la CSG, au-delà de la hausse de 1,7% prévue au 1er janvier 2018.
1 – Les règles applicables aux travailleurs détachés sont très préjudiciables aux salariés Français
La Commission Européenne a présenté en mars 2016 son projet visant à faire évoluer la directive de 1996 relative aux travailleurs détachés.
Ce texte a fait évoluer la position Européenne antérieure en préconisant l’alignement des conditions d’emploi. En affirmant le principe selon lequel « à travail égal, salaire égal », la Commission a voulu ainsi que les travailleurs détachés bénéficient des conventions collectives et des règles applicables sur les accessoires de salaire des salariés locaux (tickets restaurant, primes, etc,…).
Cependant, le texte en discussion ne solutionne en rien le cœur du problème qui est le différentiel de cotisations sociales. Il maintient le principe selon lequel les cotisations sociales applicables sont celles du pays d’origine, alors même que cette règle applicable actuellement explique la concurrence déloyale s’exerçant au détriment des travailleurs Français.
En effet, le différentiel de cotisations entre le système Français et celui des pays de l’Est est compris entre 25 à 30 points selon les pays.
C’est la raison pour laquelle le nombre de travailleurs détachés a très vite progressé en France : il est passé de 7 500 salariés en l’an 2 000 à 215 000 en situation régulière à ce jour. Si les situations ne doivent pas être assimilées, rappelons également que la France compte, selon les estimations, entre 80 000 à 300 000 travailleurs en situation irrégulière, ce qui ajoute à la nécessité de prendre rapidement des mesures.
2 – La structure de financement de la protection sociale Française ne pourra résister à la poursuite de cette évolution
Rappelons que les prestations sociales (santé, retraite, prévoyance et famille) sont financées à 80% par des prélèvements sur le travail.
Un nombre croissant de travailleurs ne cotisant plus à nos caisses obligatoires et détruisant de l’emploi chez les salariés Français : les conditions sont réunies pour l’aggravation du déficit financier de notre système de protection sociale.
Si la situation empire, l’Etat devra :
- Soit baisser fortement les retraites et les remboursements santé,
- Soit réduire drastiquement les cotisations sociales pour les transférer :
- vers la consommation au moyen d’une hausse de la TVA,
- ou vers les retraités avec la poursuite de l’augmentation de la CSG, au-delà de la hausse de 1,7% prévue au 1er janvier 2018.
CONCLUSION :
A la lumière de ces indications, l’Institut de la Protection Sociale demande au Gouvernement de travailler avec la Commission Européenne et les autres Etats membres pour que les travailleurs détachés payent les mêmes cotisations sociales que les travailleurs du pays d’accueil. L’Institut estime également nécessaire de revoir le règlement européen de 2004 sur la coordination des régimes de sécurité sociale en parallèle de la Directive sur les travailleurs détachés.