Les indépendants demandaient depuis longtemps la simplification de l’assiette de calcul des cotisations sociales. Pour répondre à leurs attentes, la version initiale du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour 2024 prévoyait une réforme radicale de l’assiette de calcul des cotisations des indépendants et des professions libérales.
Ce dispositif fut abandonné dans la version soumise au Parlement.
Mais Bruno Le Maire, lors d’une prise de parole auprès de l’U2P, a ouvert la voie à une réintroduction du dispositif par voie d’amendements qui viennent d’être déposés.
La réforme qui se dessine, soutenue par certaines organisations professionnelles, est critiquée par la grande majorité des caisses de retraite. Elle menace surtout d’alourdir le déficit public alors même que la situation de nos finances publiques n’autorise aucune mesure dispendieuse. Les agences de notation se montrent particulièrement attentives à la situation de la France, ce qui doit nous conduire à éviter toute dépense sociale non justifiée.
Le Gouvernement a proposé dans le cadre de la réforme des retraites d’ouvrir le chantier de la simplification du calcul des cotisations et des contributions sociales des travailleurs indépendants et des professions libérales.
Les objectifs affichés de cette réforme sont multiples : il s’agirait de simplifier l’assiette, avec des modalités de cotisations rapprochées de celles des salariés, d’augmenter les droits retraites grâce à une hausse des cotisations retraite tout en gardant le même niveau de prélèvements qu’aujourd’hui.
Cette intention devait se matérialiser dans le PLFSS pour 2024 par une mise en place pour tous les indépendants à compter de 2025 ou 2026. À la dernière seconde, l’article 11 du PLFSS pour 2024 a été retiré en attendant, nous dit-on, un accord avec l’ensemble des partenaires sociaux. Actuellement les indépendants et les libéraux ont 2 assiettes sociales différentes.
La proposition de réforme étant de passer à une seule assiette sociale pour les cotisations et la CSG/CRDS, ils devraient payer moins de CSG/CRDS.
L’assiette actuelle (BIC, BNC ou rémunération de gérance) serait remplacée par un nouvel agrégat comptable inconnu à ce jour : le « super brut » auquel serait appliqué un taux d’abattement identique pour tous fixé à 26 % et plafonné à 1,3 Plafond Annuel de Sécurité Sociale (PASS).
Quand on examine techniquement le nouveau dispositif, le constat est sans appel : la réforme manque tous ses objectifs !
1° Un objectif d’unification et de simplification : raté !
Aucun dirigeant, aujourd’hui, n’est capable de citer le montant du super brut de son entreprise car cette notion n’existe pas. Difficile à appréhender, cette nouvelle assiette se rajouterait à un paysage déjà fort complexe. De plus, comment parler d’équité avec un taux d’abattement unique alors que les cotisations des indépendants et des libéraux s’avèrent très différentes ?
2° Un objectif d’amélioration des retraites : raté !
La modification de l’assiette CSG/CRDS génère un manque à gagner de 1 Md€ pour l’État. Cette perte colossale de recettes entraînera ainsi une augmentation du barème des cotisations maladie n’ayant au final qu’un impact relatif sur les Caisses de retraite. De plus, le taux de la cotisation maladie des indépendants serait supérieur à celui des salariés pour un revenu supérieur à 2 PASS.
3° Le respect de l’autonomie des partenaires sociaux : raté !
Pire encore ! Pour arriver à ses fins, l’État s’immisce dans la gestion des Caisses de retraite des professions libérales en leur demandant de modifier les barèmes de cotisation des régimes complémentaires et le ferait à leur place si ces Caisses s’y refusaient. Ne cochant aucun des
objectifs affichés et complexifiant encore plus les règles pour les indépendants et les libéraux, cette réforme doit être abandonnée faute d’une réflexion technique vraiment sérieuse.
La réforme qui s’annonce n’atteint aucun des objectifs prévus.
L’IPS souhaite que cette réforme telle qu’elle se présente soit abandonnée car mal conçue dans ses modalités techniques et générant de nombreuses incohérences.
En revanche, ce sujet important mérite une approche pragmatique permettant d’améliorer la situation des indépendants et des libéraux, aussi bien pour leurs cotisations que leurs prestations.