Paris, le 22 mai 2013. Dans le prolongement de la réforme des retraites de 2003, la loi de 2010 avait renvoyé à un décret la détermination des catégories objectives. Ce décret, pris le 9 janvier 2012 par le Gouvernement Fillon, a des conséquences importantes en matière de régimes d’entreprise. Après un flou de plusieurs années, ce décret précisait enfin les critères permettant de définir une « catégorie » de salariés bénéficiaires, permettant une exonération sociale du financement patronal des dispositifs de santé, de prévoyance et de retraite. Ces nouvelles définitions s’appliqueront au 1er janvier 2014 pour les régimes déjà existants.
Ce texte donne des références pour organiser bon nombre de situations. Mais il est loin de régler tous les cas de figure. C‘est pourquoi une circulaire de la Direction de la Sécurité Sociale, qui devait donner des éclaircissements, est attendue depuis la publication du décret. Or, cette circulaire n’est toujours pas publiée. La fin de la période transitoire étant fixée au 31 décembre 2013, nombre de TPE – PME, accaparées par leur survie économique, n’ont pas adapté leurs régimes collectifs.
Si aucune mesure n’est adoptée par le Gouvernement actuel, nombre de redressements vont être engagés par les URSSAF. Cette situation va s’avérer très préjudiciable, alors même que les entreprises étaient auparavant en conformité et n’ont nullement cherché à contourner la réglementation.
L’Institut de la Protection Sociale (IPS) s’inquiète de cette situation préjudiciable pour nombre de TPE – PME. Il alerte sur les risques de cette situation et appelle au plus vite à l’adoption d’un décret réglant les problèmes identifiés.
Trois problèmes se posent en particulier :
1 – Le décret interdit désormais certaines dispenses dans des régimes mis en place par décision unilatérale.
Cette modification va, à elle seule, nécessiter la modification de la plupart des régimes mis en place dans les petites entreprises. Ces régimes contiennent en effet ces dispenses qui avaient été instituées le plus souvent à la demande des salariés.
Ces dispenses avaient été instaurées pour:
- éviter une cotisation pour des contrats de travail de courte durée,
- ne pas imposer un montant de cotisations disproportionné au montant des rémunérations des salariés à temps très partiels, sauf à ce que l’employeur la prenne en charge.
Malgré le décret, les attentes des salariés subsistent. Il est nécessaire de les prendre en compte.
Pour éviter :
- une cotisation non souhaitée pour les CDD de courte durée
- ou un coût insupportable pour les salariés à très faible rémunération
Il serait souhaitable de maintenir les dispenses pour les régimes instaurés par décision unilatérale, au moins pour les frais de santé pour lesquels les cotisations sont forfaitaires (notons d’ailleurs ici qu’il existe un certain flou sur la notion de prévoyance qui semble recouvrir la garanties frais de santé)
Autre zone de flou à préciser : quelles sont les dérogations ne pouvant être introduites que dans l’acte fondateur du régime – la mise en place initiale des garanties – et celles pouvant être introduites à tout moment de la vie du régime par avenant ou modification ?
2 – L’obligation de la couverture de l’ensemble des salariés pour les prestations « perte de revenu en cas de maladie ».
Ce point n’est pas compréhensible.
En effet, les garanties « perte de revenu en cas de maladie » ont un traitement distinct des garanties « perte de revenu en cas de maternité » et des prestations d’incapacité de travail.
Le décret prévoit des traitements différents pour les IJ servies selon l’origine de l’arrêt :
- Maladie: obligation de couverture de l’ensemble des salariés (comme pour les garanties frais de santé).
- Maternité: pas d’obligation de couverture de l’ensemble des salariés (comme pour les garanties incapacité, inaptitude, invalidité et décès)
Et le décret ne donne aucune indication sur les garanties perte de revenu en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle : on se demande où elles se situent ?
Qu’est-ce que les rédacteurs ont désigné sous le vocable « garanties incapacité » ? Les termes « garanties incapacité » recouvre aujourd’hui des contrats d’assurance assurant le versement d’indemnités journalières complémentaires à celles versées par la Sécurité sociale quelle que soit la nature de l’arrêt de travail (maladie, ATMP, maternité).
Pour faire simple, il faudrait revenir à une distinction calée sur les réalités entre la prévoyance et les frais de santé avec :
- d’une part, l’absence d’obligation de couverture de l’ensemble des salariés pour la prévoyance : garanties perte de revenus en cas de maladie, de maternité, d’ATMP, garanties incapacité, inaptitude, invalidité et décès, sous réserve d’obligations légales à venir ou conventionnelles.
Rappelons que le décret, pour les garanties perte de revenu, concerne seulement celles mises en place par les entreprises au-delà de leurs obligations (légales ou conventionnelles) de maintien de salaire.
- d’autre part, l’obligation de couverture de l’ensemble des salariés limitée aux seuls frais de santé et claire sur les différences possibles entre les catégories, du fait des arrêts récents sur l’égalité de traitement appliquée aux régimes de protection sociale complémentaires (garanties d’un niveau supérieur ou contribution de l’employeur plus élevée pour certaines catégories).
3 – Le décret ne traite pas explicitement des mandataires sociaux alors que les circulaires antérieures considéraient clairement qu’ils pouvaient bénéficier du régime s’ils appartenaient à une catégorie pour laquelle c’était prévu.
- Il faudrait que la source juridique de cette affiliation et du bénéfice du financement de l’entreprise (pour des personnes qui ne relèvent pas d’une catégorie de « salariés » et pour lesquels la décision unilatérale de l’employeur n’a pas d’effet) soit donnée pour éviter toute redressement ultérieur sur ce motif.
A la lumière de ces indications, l’Institut de la Protection Sociale (IPS) souhaite attirer l’attention des pouvoirs publics et demande :
- la publication d’un décret modificatif avant la fin de l’année 2013. Ainsi, en répondant clairement aux 3 points relevés, les risques de redressements URSSAF s’en trouveraient réduits d’autant.
La rédaction d’un décret plus clair s’inscrit parfaitement dans « le choc de simplification » voulu par le Président de la République.
- et le report de la période transitoire à un délai de 6 mois après la publication de la circulaire de la Direction de la Sécurité Sociale attendue depuis 2012.