Lors d’un colloque consacré à l’économie de la santé qui s’est tenu en avril dernier, le Medef a proposé plusieurs mesures structurelles pour réformer en profondeur l’assurance maladie.
Pour l’organisation patronale, la situation est simple : si rien n’est fait au niveau des structures de l’assurance santé, la France continuera à creuser le déficit de l’assurance maladie.
Si ce constat est partagé par tous les spécialistes de ces questions, c’est au niveau des solutions que les choses se compliquent. En effet, la résorption du déficit ne doit pas se faire au détriment des industriels de santé qui constituent l’un des secteurs économiques prospères de notre pays.
Pour cela, le Medef propose deux choses :
- 22 mesures pour faire économiser entre 15 et 20 milliards d’€ à l’assurance maladie.
- Et un schéma d’organisation dans lequel 10 milliards d’€ de cotisations d’assurance maladie obligatoire seraient transférés vers un pilier 2 (complémentaire santé, dans le cadre de l’ANI), et un pilier 3 (surcomplémentaire santé).
Des mesures concrètes pour plus de 15 milliards d’économies
1 – Le premier axe porte sur un « rééquilibrage » de l’offre de soins entre ville et hôpital. Le Medef prône ainsi un recentrage de l’hôpital sur les cas lourds et complexes et les urgences avérées et une réduction des « surcapacités hospitalières » via la suppression ou la reconversion de lits. (7 à 8 milliards d’€ d’économies estimées)
2 – Le Medef demande aussi une remise à plat des tarifs entre les cliniques et les hôpitaux privés passant notamment par une convergence tarifaire sur les actes standards et une attribution plus juste et transparente des crédits. (2 à 3 milliards d’€ d’économies estimées)
3 – Le Medef incite à mettre en place une véritable médecine de parcours qui permette de relever le défi des ALD (2 à 4 milliards d’€ d’économies estimées). Le Medef prend aussi parti pour l’automédication pour les pathologies bénignes et « l’autonomie » du patient pour la réalisation d’actes simples tels que la prise de tension artérielle. Il prône également une responsabilisation accrue passant par l’instauration d’un ticket modérateur non remboursable sur les parcours de soins ou certains actes, et la création d’un jour de carence d’ordre public également non couvert par les employeurs.
4 – Concernant les professionnels de santé, cette responsabilisation passerait par une extension de la rémunération sur objectifs de santé pour les prescripteurs hospitaliers et le renforcement des actions de maîtrise médicalisée sur divers prescriptions. Concernant les CPAM, le Medef encourage notamment l’instillation d’une émulation entre caisses pour réduire les écarts de productivité en poursuivant notamment le non-remplacement des départs à la retraite, (3 milliards d’€ d’économies estimées)
Une évolution profonde de l’organisation entre les 3 niveaux de prise en charge
Au-delà de ces mesures, le Medef aborde aussi la question de l’organisation entre régime obligatoire et complémentaire. Pour cela, il recommande le basculement de 10 milliards de cotisations du régime obligatoire vers les complémentaires santé.
Le régime de complémentaire santé, généralisé en entreprise par la loi de sécurisation de l’emploi de 2013, laisserait aussi la place à un troisième pilier, de surcomplémentaire santé, qui serait encouragé par les pouvoirs publics. Cette organisation serait susceptible pour le Medef de favoriser la responsabilisation accrue des assurés.
On voit bien ici les effets de l’ANI de 2013 qui va faire évoluer les complémentaires d’entreprise vers un dispositif généralisé et minimal, supplétif en quelque sorte du premier pilier géré par la sécurité sociale
Il s’agirait là d’une évolution profonde de l’organisation du système de soin, loin de l’évolution vers une étatisation entamée de longue date, en particulier lorsque Alain Juppé était Premier Ministre.
Dernier problème soulevé, et là on ne peut que souscrire à la proposition patronale : la nécessité d’une planification pluriannuelle de manière à éviter une incertitude sociale et fiscale permanente. La récente fiscalisation des cotisations patronales d’assurance maladie en est une triste illustration.